L'illustratrice
Sabrina Tobal a eu la gentillesse de se prêter au jeu des questions-réponses à propos de l'énorme carte de la cité de Venice qu'elle a réalisée.
Ce plan a-t-il représenté un challenge particulier pour toi en termes de technique, de temps à y consacrer ?
C’est la première fois que je fais ce genre de travail. J'étais partagée entre angoisse, imposture et excitation pour relever cet énorme défi ! Donc oui, c'était un énorme challenge technique, car ce n'était pas du tout dans ma zone de confort. Je préfère dessiner des personnages légendaires, des décors avec de belles lumières et ambiances, raconter des histoires par le biais du dessin…
Cette carte, au début, je l'ai considéré surtout sur l’aspect technique ; le démarrage a été très long et difficile, le temps de trouver un compromis entre le nombre de maisons, leurs apparences, les monuments et le niveau de détail. J’ai persévéré, j'ai pris l’exercice à cœur sachant qu’une fois la bonne méthode trouvée, il n’y avait plus qu'à avancer avec le temps que ça prenait.
C'était le second challenge. Il fallait être patient, la récompense du travail accompli ne vient pas après une journée de travail dessus. Ce n'était pas comme une illustration, où on a le sentiment d’avoir bien avancé au bout de 8-10 heures. Quand je dé-zoomais, c'était plutôt frustrant (oh tu as fait 4 cm² de dessin aujourd’hui !). Mais après quelques semaines, pouvoir se balader dans la carte, imaginer ce qu’il se passait dans les quartiers, ça devenait magique !
(Ma vie sociale est enterrée dans le jardin haha !).
Quels outils de travail as-tu utilisé ?
Bien que j’ai eu recours à la 3D sur d’autres plans d’Ecryme, afin de faire des perspectives un peu charmeuses, j’ai considéré que pour le plan de Venice, cela me ferait perdre du temps. Ici, j’ai essentiellement utilisé photoshop : une brush simple, ronde et nette. J’ai fait mes premières maisons et quartiers au trait levé, j’ai préféré garder le côté pur du dessin, pas trop de traits à la règles, droit et froid, plutôt du bon vieux "fait maison".
Quelles ont été tes méthodes de travail ?
Dans un premier temps, j’ai construit la carte en faisant des roughs des quartiers principaux, m’appuyant sur les infos et les beaux petits plans des auteurs.
|
Nom de code de ce plan des auteurs : "plan moche". Il permet de mesurer tout le talent de Sabrina. |
Une fois les lieux, la position des traverses, les principaux monuments validés, j’ai esquissé grossièrement des pâtés de maisons que j’ai copié/collés un peu partout jusqu'à remplir la carte afin d’avoir un premier visuel global. J’ai ensuite repassé au propre un bon quart de la carte. Là je me suis dit que ça allait être bien long ! Du coup j’ai fini par copier certains quartiers "au propre", pour les placer ailleurs.
Afin d'éviter l’effet de répétition, j’ai retouché ces quartiers, en changeant des toits, des fenêtres, en ajoutant d’autres maisons...etc. J’avais surtout besoin de garder une cohérence au niveau des tailles pour faire ressortir les endroit importants ou atypiques. Pour la couleur, j’ai préféré faire quelque chose de plus moderne, presque industriel, avec de l’écryme verte qui tranche bien avec les couleurs des routes et des maisons.
De quels éléments autres que les descriptions des auteurs t’es-tu inspirée pour travailler ?
Je me suis inspirée de vieilles cartes (faites en gravure) de Paris, surtout celle de Tarvernier datant de 1630. J'ai aussi fait beaucoup de recherches documentaires, regroupant des photographies et plans du 19e siècle de Venise. Et puis, j’ai aussi regardé de près le travail de la crème des illustrateurs de cartes, comme mon ami Olivier “Akae” Sanfilippo. En essayant de déchiffrer son travail et discutant un peu avec lui, j’ai débloqué quelques difficultés pour offrir au monde et fans d’Ecryme une carte digne de ce nom, je l’espère !